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jeudi 27 janvier 2011

Mais toujours dans nos coeurs

La cérémonie d'inhumation a eu lieu mardi 25 janvier. La petite église de Valmondois était pleine à craquer
Voici l'hommage que j'ai rendu à mon épouse tant aimée
J’ai longtemps cherché ce qui caractérisait le mieux Karine.
De tous les témoignages que j’ai reçu, de ses amis, de ses proches et de ses parents, ce qui ressort le plus souvent sont les mots courage, détermination, combativité et exemplarité.
Ce vocabulaire guerrier correspond bien à son caractère mais Karine n’était pas une guerrière.
Evidemment, elle a combattu, combattu la nature qui lui refusait des enfants, si fortement et si complètement qu’elle a fini par avoir notre petite dernière toute seule, sans l’aide d’aucun médecin. Elle a combattu sa maladie aussi, avec une détermination entière et complète qui a forcé le respect de tous, y compris de ses médecins pourtant habitués. Elle l’a combattu sans jamais laisser sa famille et ses enfants de coté, en les suivant jusqu’aux derniers instants dans leur apprentissage, leur donnant par là même une leçon de vie inoubliable.
Mais Karine n’était pas une guerrière. Elle ne cherchait pas le combat.
Alors j’ai cherché au-delà de ces mots qui elle était vraiment.
Pleine d’amour et d’attention pour les siens, pleine de vitalité, et de joie. Pleine de vie, d’envies et de projets. Déterminée et jusquauboutiste.
Mais ce ne sont pas là des qualités si rares qu’elles agrègent autour de la personne qui les possède des amitiés si sincères et si fortes.
Alors j’ai cherché encore, soulevant les voiles du trésor qu’elle possédait en elle-même et qui la rendait si admirable. Et j’ai trouvé…
Ce qui caractérisait Karine au-delà de toutes ces qualités, c’était l’honnêteté.
Karine honnête avec elle-même et avec ses proches. Pourfendant le mensonge et les non dits.
Karine honnête avec les autres, leur parlant franchement et directement, toujours directe, parfois un peu crue même.
Karine honnête au plus profond de son âme, expliquant très tôt à ses enfants qu’elle était malade, le combat qu’elle menait, les défaites successives et la vie à laquelle ils devaient se préparer après son départ qu’elle leur annonçait proche malgré nos protestations.
Karine honnête et droite, en toute circonstance, appelant un chat un chat, secouant ceux qui l’entouraient et les poussant, malgré eux parfois, à devenir meilleurs.
Cette qualité difficilement exprimable mais tellement perceptible tant elle en irradiait, qualité que percevait toute personne un tant soit peu intelligente qui avait la chance de croiser son chemin et qui l’attachait à elle de manière durable. Et j’ai pu me rendre compte ces derniers jours que tous ses amis, par leurs actes et leurs témoignages étaient d’une qualité hors du commun.
Et vous tous qui êtes réunis maintenant auprès d’elle pour ce dernier adieu, je sais que vous repensez maintenant à des moments passés avec elle et que vous vous dites : « oui, en effet, je me souviens qu’en cette occasion, elle était comme ça, honnête, tout simplement et que ça m’avait frappé cette façon de faire ou de dire les choses, si peu fréquente finalement »
Ses enfants ont appris à vivre avec cet exemple, parfois douloureusement lorsqu’il leur arrivait de mentir ou de dissimuler quelque chose.
Mais ils ont appris par la même occasion à être meilleurs, et à être aimés. Parce qu’on ne ment pas à quelqu’un qu’on aime et que cette leçon leur était répétée tous les jours, à tous les instants.
Cette qualité qui la définie si bien, on peut la retrouver dans tous les instants de sa vie. Lorsque par exemple nous nous rendions en consultation pour, disait-elle, que « nous entendions la même chose ». Certes, nous entendions les mêmes mots, mais inévitablement, lorsque nous en reparlions après, elle m’expliquait ce qui avait été réellement dit parce qu’inconsciemment, j’avais omis des informations, et que le résultat que je retenais était toujours meilleur et plus encourageant que celui qui avait été annoncé. Mais elle, elle n’omettait rien. Elle entendait les verdicts et jamais elle ne se voilait la face. Jamais elle ne se mentait. Et même si j’argumentais dans un sens plus « facile » à accepter, plus optimiste, je savais au fond de moi qu’elle disait la vérité, et qu’elle était voyante au milieu de ceux qui s’aveuglaient eux-mêmes.
A ses collègues/copines avec qui elle mangeait de temps en temps, elle expliquait ce qui lui arrivait avec une lucidité et un détachement qui les stupéfiaient. Ses plus proches amies sont venues me voire pour me dire cette stupéfactions, m’expliquant qu’elles se téléphonaient le lendemain entre elles pour s’assurer qu’elles n’avaient pas rêvé et avaient bien entendu les mêmes choses.
Aujourd’hui, elle a perdu son dernier combat. Son adversaire était trop fort, mais surtout terriblement vicieux, terriblement malhonnête. Il l’a détruite de l’intérieur, sans lui laisser la moindre chance. Mais il n’a jamais vaincu son âme et pour gagner, il lui a fallu la détruire physiquement.
Son corps nous a donc quitté, mais son souvenir restera gravé à jamais dans nos cœurs. Dans le mien bien sûr, moi qui ai eu la chance et l’incroyable privilège de partager sa vie. Je lui faisais remarquer il y a peu que depuis l’année dernière, nous avions passé plus de temps de notre vie ensemble que séparés… Dans celui de ses enfants, qu’elle a voulu bâtir à son image, forte, inébranlable, convaincue et honnête. De ses parents et de son frère qui ont contribué à construire cette femme si admirable. De ses cousines qu’elle adorait, de sa famille si importante à ses yeux. De tous ses amis aussi, des plus anciens aux plus récents. Tous des gens d’une qualité de cœur incroyable qui nous ont soutenu dans nos épreuves de la façon la plus admirable qui soit. De ses collègues enfin dont les témoignages que j’ai pu avoir ces derniers jours sont unanimes à saluer l’admiration qu’elle suscitait.
J’ai commencé à penser à cet éloge depuis malheureusement de nombreux mois, quand le sommeil était long à venir ou que les angoisses surgissaient brusquement. Je ne peux souhaiter à personne de vivre l’épreuve que nous avons subit. Mais elle nous a donné tellement d’amour, à moi et à nos enfants qu’il nous en reste encore à consommer pour un moment encore. Et je pense que nous l’avons en retour remplie d’amour également et qu’elle a maintenant l’éternité pour le savourer.
Merci à vous de l’accompagner vers sa dernière demeure.

mercredi 26 janvier 2011

Partie...

Après près de 2 ans de combat, Karine a été vaincue par sa maladie.
Elle nous a quitté mardi 18 janvier, à 15h10 comme me le rappèle son acte de décès.
Les derniers mois ont été durs. Les plus durs.
La douleur s'était installée depuis l'été. Un traitement de cheval a permis d'atténuer cette flambée, mais à quel prix. Ses dernières chimios la rendait malade à un point inimaginable. Elle partait le ventre noué, sachant que les 3 puis 4 puis 5 jours suivants seraient invivables tant les nausées et la fatigue seraient fortes. A chaque cycle, le temps de récupération était plus long. Et elle devait savourer les quelques jours de répits avant de reprendre le cycle suivant.
Mais à aucun moment elle n'a baissé les bras. Elle y allait en reculant mais elle y allait.

Puis, vers la fin novembre, elle a senti que la maladie reprenait du terrain. Les douleurs sont revenues et se sont ajoutées à son mal être permanent. Elle a serré les dents et a organisé les fêtes de fin d'année. Noël d'abord puis le nouvel an. Les deux à la maison, incapable qu'elle était de supporter un voyage en voiture plus de quelques minutes.
Début janvier, une consultation rapide chez l'oncologue et celui ci la place en clinique, près de chez nous, pour gérer la douleur qui devenait intolérable et ingérable à domicile.
Réticente au début, elle va finalement y passer quelques jours reposée. La morphine en continu et les traitements contre le mal de tête vont lui permettre de dormir de nouveau et de retrouver le sourire.
Sourire de courte durée, un IRM de la tête lui confirme ce qu'elle redoutait mais avait deviné depuis un moment. Des métastases sont montées se loger là haut et ce sont elles qui provoquent ces douleurs de migraines.
Un traitement est prévu, des rayons, elle a sa première séance vendredi. Samedi matin, elle va bien, même si elle éprouve de la fatigue et des difficultés à s'exprimer. En fait tout au long de la semaine, sa voix est devenue pâteuse, comme quelqu'un qui aurait bu. J'attribuai cela à la morphine mais en fait, ça se déchaine la haut et ce sont ses fonctions cérébrales qui sont touchées.
Samedi midi, elle a voulu se lever seule et a fait une chute. Quand j'arrive pour la voir avec les enfants, elle va déjà beaucoup moins bien.
Dans l'après midi, elle fait des crises de convulsion avant d'être endormie avec des doses de tranquillisant.
Dimanche, elle ne réagit quasiment plus. Elle arrive juste à grogner quelques mots, esquisser quelques mouvements.
Lundi, elle ne bouge plus. Sa tête est bloquée, tournée vers la droite. Je passe la journée à lui parler, à essayer de la faire vivre de nouveau, mais en vain.
Je vois le médecin dans l'après midi et il m'annonce que c'est la fin. La maladie est partout. Méningite carcinomateuse. Karine va mourir, c'est une question d'heures, de jours peut être. Je vais récupérer les enfants à l'école et leur annonce la nouvelle. Tous viennent voir leur maman une dernière fois. Ils pleurent mais ils savaient. Nous le leur avions dit, ils étaient préparé. Mais quand même...

Dans la soirée, elle réagit, mais la seule chose que l'on arrive à comprendre, c'est qu'elle souffre de nouveau, qu'elle ne va pas bien. On essaye de la soulager, de lui faire changer de position, rien n'y fait. Je vais voire les infirmiers qui vont la plonger dans un coma artificiel léger.
Je passe la nuit près d'elle. Elle dort. Les enfants sont chez leur cousine et ils ont bien réagit. Ils vont bien.
La matinée de mardi se passe. Je reçois la visite du père Jean-Baptiste, Aumônier au collège des grands. Il me dit qu'il a vu Adèle, la plus "grande" des jumelles et qu'il est venu pour Karine. Il lui administre le sacrement des malades. Dans l'après midi, elle reçoit la visite de quelques amies infirmières. Je profite de ce moment pour aller parler avec la psychologue de la clinique pour la gestion de l'après. On vient nous interrompre, Karine est en train de partir. Sa respiration s'est faite plus difficile soudainement et ses collèges de réanimation savent exactement ce qui se passe. J'arrive dans la chambre pour la prendre dans mes bras, lui dire les derniers mots. L'encourager à partir, que je gère la situation, que les enfants s'en sortiront. Qu'elle peut être rassurée. Qu'elle ne s'accroche pas inutilement.

Elle respire encore deux fois, faiblement et puis s'arrête. Il est 15h10.